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Date de vente : 09-06-2023
Commissaire priseur : Thierry de Maigret


N° de lot : 374

CARTIER
Bel ensemble en or 750 et platine 850 millièmes composé d'un collier articulé numéroté comprenant 4 rangs de maillons stylisés, décoré de 2 motifs de fleur ponctués de cabochons de turquoise, retenant 11 pampilles rapportées habillées de perles fines montées en grappe et de perle d'or filigrané, ainsi que d'une paire de boucles d'oreilles à l'identique, l'une signée. L'ensemble rehaussé de cabochons et de perles de rubis et d'émeraude, certains sur paillon, d'émail et de petits diamants brillantés.
On y joint une paire de bracelets joncs de mariage ouvrants à décor émaillé polychrome de fleurs et rehaussés de roses facettées, ornés de têtes d'éléphants affrontées, leurs colliers et leurs yeux ornés de rubis. Ouverture par pas de vis inversé. Travail indien de la fin du XIX° début XX° siècle. (manques à l'émail, restaurations, petits accidents pour les bracelets)
L'ensemble est conservé dans un écrin en cuir de la maison Cartier. Travail de la fin des années 1940 début 1941.
Poids brut du collier Cartier: 183.70 g.
Long: 33.5 cm.
Poids brut des boucles Cartier: 40.10 g.
Haut: 7 cm.
Poids brut du bracelet indien1: 109.10 g.
Dim. int: 5.4 x 4.7 cm.
Poids brut du bracelet indien 2: 108.20 g.
Dim. int. 5.5 x 5 cm.
Exempté: art. 524 bis al.c. pour les deux bracelets.

Cette parure est accompagnée d'une expertise n°XP1239-190423 de IAJA expertise du 19 avril 2023.

La relation que Cartier entretient avec l’Inde est ancienne et fructueuse. Dès 1901, soit l’année suivant l’installation du joaillier à la mythique adresse du 13 rue de la Paix, Pierre Cartier est appelé à la cour de Londres afin de transformer certains bijoux indiens de la
couronne, trop lourds ou trop masculins et permettre à la reine Alexandra de les porter à son aise. De cette transformation naît un collier de style indien constitué de 71 perles et 12 rubis cabochons que la reine portera souvent. Outre la couronne royale britannique, Cartier compte parmi ses meilleurs clients certains richissimes maharadjas. Souverains de petits états vassaux de la couronne britannique, ils aiment à se rendre en Europe, officiellement pour raisons diplomatiques, officieusement pour goûter les plaisirs qu’offrent les capitales européennes. Ils sont familiers des bijoux depuis toujours et portent en parures extravagantes des diamants exceptionnels extraits des mines de Golconde, des saphirs du Cachemire aux couleurs extraordinaires et des spinelles du Badakhchan. Ils y ajoutent des rubis de Birmanie et de Ceylan et des émeraudes gravées de pierres et de motifs floraux jadis importés de Colombie. Grâce à ces clients fortunés, les échanges que Cartier entretient avec l’Inde deviennent rapidement considérables. Désireux de faire connaître les bijoux traditionnels indiens, Cartier organise, dès 1912, des expositions à Londres, Paris, Boston et New York. Ces évènements illustrent la volonté de Cartier de faire connaître la culture indienne, mais aussi de diffuser auprès de sa clientèle européenne, les formes et les motifs exotiques bientôt repris dans l’ornementation des bijoux qu’il va proposer à la vente. Car si les maharadjas passent commande à Cartier de parures et de montures, celui-ci s’inspire en retour de l’esthétique indienne comme l'écrit un chroniqueur de Vogue en 1922 : «quant à l’art de la bijouterie il est devenu l’un des plus parfaits, des plus délicats de notre temps. Il mérite que l’on y prête une attention toute particulière car, en dehors de la Renaissance italienne, Je ne vois guère à lui opposer que le bijou hindou d’une beauté qui touche au miracle mais comme il n’était pas possible à beaucoup de femmes de posséder ces anneaux incrustés et ces émaux de Jeypore (sic) (...) nos grands joailliers les ont reproduits à la perfection ».
L’intérêt pour l’Inde s’accroit encore davantage à partir de 1933 lorsque JeanneToussaint, prend les rênes de la Haute joaillerie chez Cartier. Sous son influence s’opère une modification dans la fabrication des pièces de style indien. Si au cours de la décennie précédente, Cartier s’inspirait des formes et des décors de l’Inde pour créer des bijoux, à partir du milieu des années 1930, de véritables bijoux et artefacts importés du sous-continent sont modifiés, intégrés ou mélangés à des éléments strictement européens pour entrer dans la fabrication des pièces. Cette évolution du style coïncide avec la mode du temps qui voit, par exemple, le magazine Harper’s Bazaar décrire dans son numéro de février 1934 comment Daisy Fellowes porte à son cou un collier indien ancien en rubis et émeraudes importé de l’Inde par Cartier ou Vogue illustrer, en 1938, les bijoux rapportés d’Inde par Lady Mendl, Coco Chanel ou Jeanne Toussaint elle-même.
La parure présentée ici entre parfaitement dans cette catégorie de bijoux mixtes créés
par Cartier à partir d’éléments traditionnels indiens. Constituée de deux bracelets indiens sans modification de la part de Cartier en dehors du système de fixation, mais aussi de boucles d’oreilles et d’un collier dont seuls certains éléments ont été fabriqués à Paris, elle est un parfait exemple de ces bijoux mixtes qui font fureur à l’époque. Cette mode perdura pendant 25 ans et à la fin des années 1950, le célèbre joaillier parisien continuera de recevoir des commandes de clients, telle la duchesse de Windsor, désireux de porter des créations de Cartier composées d’éléments joailliers indiens.
Olivier BACHET, expert, directeur d’IAJA-Expertise.

Numéro vendome Estimations
NV90108000€ / 10000€